13 avril 2006
Un vigneron Alsacien...
Le bien connu, bien aimé et bon vivant Seppi Landmann s'exprimait, dans sa lettre d'information datée de Noël 2005, sur un sujet qui nous touche, celui de la fête. Je trouve en effet scandaleux que l'on puisse envisager de capituler en annulant des fêtes traditionnelles autour du Vin. Il doit y avoir plus d'une idée à inventer, pour que de telles fêtes se déroulent dans la bonne humeur en empêchant que des pochtrons viennent troubler leur bon déroulement. Organiser par bus des rapatriements aux centres des villes voisines pour ceux qui ont décidé de faire la fête en laissant leur véhicule au garage me paraît être de l'ordre du possible.
Je ne résiste pas à l'envie de vous faire partager cette première lettre qui, bientôt, sera suivie d'une autre... Michel Smith
Cette année quand mes collègues vignerons de Soultzmatt, découragés par l'ambiance et les réglementations de plus en plus prohibitionnistes de notre société, ont décidé avec amertume l'arrêt de la fête du village du 1er samedi du mois d'août qui, depuis 17 ans, s'appelait la Nuit des Grands Crus du Zinnkoepflé, j'ai essayé de cerner cette sinistrose languissante et ce découragement profond qui envahissent et ternissent notre pays et qui font des ravages, en général, mais particulièrement dans le monde viticole.
A l'analyse, il n'y a pas d'invasion venue d'ailleurs, mais une implantation insidieuse du mal été orchestrée à petits feux par nos édiles voulant imposer leur manière de voir le bonheur au peuple.
Les choses se seraient mieux passées si les gouvernements successifs avaient réussi à dynamiser l'économie de notre pays et à réduire le chômage. Mais apparemment, ce n'est pas leur spécialité et, bien au contraire, dans le domaine de la vigne et du vin, ils se sont acharnés sur fond d'idéologie anti-alcoolique à condamner irrémédiablement aux friches au moins un tiers du vignoble français et cela à très court terme.
Bientôt, ces dégâts, dans cette partie de l'agriculture exceptionnellement prospère, assurant autant d'emplois que l'industrie automobile et l'aéronautique réunie et ramenant des milliards de devises, laisseront un vignoble français éventré, paupérisé et subventionné de tous bords.
De plus la mort de chaque vigneron entraînera sept autres corps de métier dans sa chute.
Quelles seront les régions viticoles, incrédules, abattues et aigries qui passeront à la révolte ? Et dans quel but dans ce monde chahuté et incertain de partout ?
Pour l'Alsace, la situation du marché est encore fort enviable. L'originalité, le fruité, les cépages du vin d'Alsace résistent plutôt bien à la concurrence des vins étrangers. Cela n'empêche pas les Alsaciens de sentir la pression de cette affolante et galopante surproduction mondiale des vins de l'ordre de 25% venant de pays où les règles de production sont quasiment inexistantes et les frais de production sans comparaison aux nôtres.
Et pourtant, nous exerçons un métier merveilleux qui fait rêver beaucoup de personnes et surtout ces 20% de Français (et de plus en plus les étrangers) qui boivent encore régulièrement du vin. Aussi, je suis toujours ému quand j'accueille pour les vendanges du week-end ces oenophiles et ces gastronomes de toute l'Europe sinon du Monde entier, souriants et heureux, qui viennent s'immerger quelques heures dans la belle nature de la Vallée Noble et dans la pratique de la récolte avec la sélection des raisins et les tries des grappes atteintes de pourriture noble.
Là, les mots amitiés, convivialité, fête, existent toujours, même si dans le contexte actuel on ne peut plus faire la fête comme avant. On commence d'ailleurs à s'en rendre compte et cette cassure à mon sens irréparable, a pour la première fois cette année fait l'objet d'un titre interrogateur dans la presse alsacienne au moment de la mythique Foire aux Vins de Colmar la fête et le vin : "un mariage menacé ?"La réponse est bien sûr franchement oui, quelles que soient les rhétoriques insidieuses développées pour expliquer les choses et tourner autour du pot. Ceci dit, je reste toujours amusé et interpellé de voir le comportement de certains conducteurs grands défendeurs des lois actuelles sur l'alcoolémie au volant et qui, après avoir goûté aux plaisirs du relâchement, rentrent chez eux en roulant prudemment bien sûr par les petites routes de campagne, mais restant persuadés que se sont les autres qui sont des dangers publicdangers dangers publics à punir au premier rond point de service.
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